Le 31 août 2018, l’Opérateur de Transport de Wallonie (« OTW », ex-Groupe TEC) a lancé un marché ayant pour objet « la fourniture, le déploiement et l’installation d’un réseau intranet IP VPN dans les sites et dépôts du groupe TEC ou de leurs opérateurs privés (environ 150 sites répartis sur la Wallonie) afin de pouvoir transmettre des informations de façon bidirectionnelle entre sites et d’offrir un accès vers l’Internet public ». La procédure de passation choisie fut celle de la procédure négociée avec appel à la concurrence préalable et deux soumissionnaires, en ce compris la S.A. NEWIN, sont entrés en négociation et ont remis leur offre. Le marché fut finalement attribué au concurrent de NEWIN, lequel s’est vu octroyer un score de 93,09 points sur 100 (contre 88,97 sur 100 pour la requérante).
Le cahier spécial des charges contenait quatre critères (« prix », « qualité et performances techniques », « atout ou plus-values que peut faire valoir le soumissionnaire » et « clarté de l’offre »). Le critère « qualité et performances techniques » était lui-même subdivisé en sept sous-critères. Chacun de ces critères et sous-critères faisait dûment l’objet d’une pondération.
Il est toutefois ressorti du rapport d’analyse des offres joint à la décision d’attribution que l’ASBL qui avait réalisé cette analyse avait examiné et comparé les deux offres au regard d’une soixantaine d’éléments, chacun faisant l’objet d’une pondération propre.
Pour la société NEWIN, requérante, il s’agissait d’autant de (sous)-sous-critères d’attribution qui auraient dû être annoncés dans les documents du marché, certainement eu égard au fait que leur connaissance eût influencé la préparation de son offre. En outre, elle observait que, par hypothèse, la pondération accordée à chacun de ces sous-critères lui était de même inconnue au moment de déposer son offre.
Pour la partie adverse, il ne fallait y voir que de simples « éléments d’appréciation/de différenciation », au surplus « parfaitement prévisibles pour les soumissionnaires » ; et même à supposer qu’il y ait lieu de qualifier ces éléments de sous-sous-critères, il faudrait constater que l’absence d’information de ces éléments dans le cahier spécial des charges n’aurait en rien modifié tout ou partie des critères annoncés, influencé la préparation de l’offre de la requérante, ou encore eu un effet discriminatoire envers cette dernière.
Sans trancher explicitement la question de savoir si la soixantaine d’éléments mobilisés pour comparer les deux offres méritait la qualification de « (sous)-sous-critères d’attribution » ou de simples « éléments d’appréciation » – dans son arrêt du 18 juin 2019, le Conseil d’Etat retient les termes d’ « aspects (examinés dans le cadre des sous-critères annoncés) » -, la haute juridiction administrative constate que « rien dans les documents du marché ne permettait de prévoir que les aspects qui seraient ainsi examinés par la partie adverse ne présenteraient pas toujours, au sein de chaque critère ou sous-critère, la même valeur et que certains auraient une plus grande importance que d’autres » ; et le Conseil d’Etat de relever ensuite toute une série d’exemples de pondérations accordées à ces éléments que rien ne permettait de déterminer, avant de conclure que « la connaissance de cette pondération aurait, par ailleurs et comme le soutient la demande de suspension, été susceptible d’influencer l’offre de la requérante si cette pondération avait été connue lors de la préparation de celle-ci ».
La suspension de l’exécution de la décision d’attribution attaquée fut dès lors ordonnée.