1. L’arrêt de la Cour de cassation du 8 novembre 2018 vient d’apporter une réponse précise à une série de questions qui se posaient en matière de publication des règlements communaux, et plus particulièrement à propos de la manière d’apporter la preuve de la réalisation de la formalité de la publication par voie d’affichage.
2. Les règles, fixées par les articles 112 et 114 de la Nouvelle loi communale, et les articles L1133-1 et L1133-2 du Code wallon de la démocratie locale et de la décentralisation, sont bien connues. Les règlements communaux sont publiés par le bourgmestre, par la voie d’affichage. L’affiche doit indiquer l’objet du règlement, la date de la décision par laquelle il a été adopté, le cas échéant la décision de l’autorité de tutelle, et également le ou les lieu(x) où le texte du règlement peut être consulté par le public. Le fait et la date de la publication des règlements communaux sont constatés par une annotation dans un registre spécialement tenu à cet effet.
3. Le pourvoi avait été dirigé par la Ville de Charleroi contre un arrêt de la Cour d’appel de Mons du 8 juin 2017, qui avait déclaré non fondé l’appel de la Ville dirigé contre le jugement qui avait annulé la taxe communale litigieuse. La Cour d’appel avait considéré que le règlement-taxe dont application n’était pas opposable aux redevables au motif qu’il n’était pas établi que celui-ci avait été publié selon le vœu de la loi. La Cour d’appel s’était fondée à cet égard sur les trois considérations suivantes.
L’arrêt de la Cour d’appel avait fait valoir, tout d’abord, que l’affichage était un mode permanent de publication, l’affichage à l’intérieur des locaux de la maison communale, durant les heures d’ouverture de celle-ci, n’étant dès lors pas conforme à ce qui avait été prévu par le législateur. D’autre part, la Cour d’appel avait considéré que la publication n’était pas prouvée dès lors que le registre des publications se composait de feuilles volantes tenues par ordre chronologique et reliées postérieurement, annuellement, ce qui n’était pas, à l’estime de la Cour, conforme au prescrit légal. Enfin, dans son arrêt, la Cour d’appel avait eu égard à d’autres documents que l’extrait du registre aux publications, à savoir un certificat et un avis de publication.
4. Chacun de ces trois motifs était critiqué par l’une des branches du moyen invoqué à l’appui du pourvoi de la Ville de Charleroi. La réponse de la Cour de cassation à chacune des branches du moyen est très claire, et ne laisse place à aucune interprétation.
Sur la question du lieu de l’affichage, c’est-à-dire l’endroit où peut être apposée l’affiche assurant la publication d’un règlement communal, la Cour de cassation a considéré que les dispositions applicables, à savoir l’article L1133-1, alinéas 1 et 2 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation (auquel correspond l’article 112 de la Nouvelle loi communale), ne prévoyaient « pas que l’affichage, qui ne reproduit pas l’intégralité du règlement ou de l’ordonnance, doit être accessible en permanence au public ». En d’autres termes, on ne peut exiger d’une commune que l’affichage soit assuré de manière permanente, c’est-à-dire 24 heures sur 24, dans un endroit accessible au public en tout temps. Rien n’empêche donc que l’affichage soit réalisé uniquement dans les locaux de la maison communale, et soit accessible seulement pendant les heures d’ouverture de celle-ci.
En ce qui concerne la tenue du registre aux publications, la Cour de cassation, statuant sur la deuxième branche du moyen, a affirmé qu’il n’était « pas requis que le registre reprenant les annotations numérotées dans l’ordre des publications soit préalablement relié ». La pratique, qui consiste à tenir le registre aux publications sur des feuilles volantes ou non préalablement reliées, les annotations étant faites par ordre chronologique, ce dont doit attester le numéro d’ordre attribué à chaque annotation, l’ensemble des feuilles étant reliées a posteriori (par exemple à la fin de chaque année), est ainsi validée.
Enfin, statuant sur la troisième branche du moyen, la Cour de cassation, rappelant sa jurisprudence initiée par son arrêt du 21 mai 2015 (Pas., 2015, n°330), affirme que l’annotation dans le registre aux publications est le « seul mode de preuve admissible de la publication (…) d’un règlement communal ». Dès lors, pour décider que le règlement-taxe n’est pas opposable aux redevables, une juridiction ne peut avoir égard à d’autres pièces que cette annotation, sauf à violer l’article L1133-2, alinéa 2 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation (auquel correspond l’article 114, alinéa 2 de la Nouvelle loi communale, et les articles 1er à 3 de l’arrêté royal du 14 mai 1991 relatif aux annotations dans le registre des publications des règlements et ordonnances des autorités communales.
L’importance de cet arrêt n’échappera pas aux observateurs et aux praticiens du droit communal. Outre le sens des positions ainsi prises par la Cour de cassation, cette importance tient notamment à la manière très claire dont la Cour a répondu aux questions qui lui étaient soumises.